Après le débarquement allié en Normandie le 6 juin 1944, la guerre se poursuit pendant presque un an jusqu’à la Libération. L’Allemagne est prise en tenaille entre les troupes alliées à l’Ouest (notamment les Américains) et à l’Est (les Soviétiques).
En janvier 1945, à l’approche des Soviétiques, les nazis procèdent en toute hâte à l’évacuation du camp d’Auschwitz et tentent d’effacer les traces de l’extermination. Par un froid mordant, les déportés survivants, épuisés, affamés, assoiffés, sont précipités, en troupeaux humains, vers l’Allemagne. La plupart d’entre eux périssent, lors de cette lugubre marche de la mort. D’autres camps sont évacués dans des conditions aussi effroyables.
Le 8 mai 1945, à Berlin, a lieu la signature de la capitulation sans condition de l’Allemagne hitlérienne. La Seconde Guerre mondiale prend fin en Europe.
La barbarie nazie est vaincue.
À Paris, l’hôtel Lutétia, investi par les Allemands pendant la guerre, est occupé par les résistants jusqu’en septembre 1945 pour y accueillir les rescapés des camps d’extermination. Ces survivants, principalement des Juifs d’origine immigrée, sont incapables, le plus souvent, de raconter l’horreur qu’ils ont vécue. Ils doivent, de plus, affronter la détresse des familles des disparus et des morts.
En France, malgré l’Occupation et malgré l’antisémitisme d’État du gouvernement de Vichy, plus des deux tiers des Juifs ont pu échapper à la déportation. La Résistance spécifique des Juifs, leur combativité individuelle, l’appui de la Résistance en général et la solidarité d’une partie de la population française, ont permis de sauver nombre de persécutés.
En 1945, personne n’imagine la mesure exacte de l’ampleur du génocide en Europe de l’Est : environ 6 millions de victimes.
LIBÉRATION DE LA FRANCE
La Résistance extérieure, dirigée par le général de Gaulle depuis Londres et la Résistance intérieure civile et militaire combattent le régime de Vichy.
La Libération de la majeure partie de la France, en automne 1944, est précédée de libérations partielles. Forces alliées et Résistance opèrent.
Quelques dates-clefs :
— Le 8 novembre 1942, les alliés, anglais et américains, de la France libre du général de Gaulle débarquent en Afrique du nord, alors sous administration française.
— Le 4 octobre 1943, la Corse est le premier territoire à se libérer de manière autonome.
En mai 1944, le Conseil National de la Résistance (CNR) met en place les Milices patriotiques créées sous l’impulsion de la Résistance communiste. Elles agissent sous l’autorité des Comités de Libération.
Une Milice patriotique juive rassemble les jeunes de l’UJJ (Union de la Jeunesse Juive de la M.O.I.).
— Le 6 juin 1944, les alliés de la France libre débarquent en Normandie. Grâce aux maquisards FFI, les Allemands sont contenus et repoussés.
Dans les différentes régions du pays, la Résistance est très active :
— Les 7 et 8 juin 1944, en Corrèze, les maquisards limousins occupent la préfecture, Tulle, mais les SS réoccupent la ville et commettent un massacre : 99 hommes sont pendus aux balcons de la ville et 200 autres sont déportés en Allemagne, au camp de Dachau.
— À partir du 15 août 1944 : Les alliés de la France libre du général de Gaulle débarquent en Provence. L’armée allemande quitte un large quart sud-ouest de la France.
La Provence sera libérée en 2 semaines.
— Le 16 août 1944, les maquisards limousins libèrent Tulle définitivement
— Le 25 août 1944, dans la Creuse : la préfecture, Guéret, est libérée.
À Paris, du 19 au 25 août 1944 :
Le colonel Rol-Tanguy, chef régional des FFI, entouré de son État-major, dirige la Résistance à Paris depuis son poste de commandement souterrain.
À l’appel du Comité parisien de Libération, les syndicats décrètent la grève générale (cheminots, ouvriers, gendarmes, policiers…). Devant les appels à l’insurrection, les nazis exécutent 35 résistants et sont prêts à détruire la capitale.
L’insurrection populaire précipite la libération de Paris. La 2ème Division blindée (DB) du général Leclerc pénètre la première dans la ville libérée.
— Le 27 août, Marseille est libérée après les combats de la Résistance commencés le 21 août.
— Les 2-3 septembre 1944, Lyon, Villeurbanne et Lille sont libérées grâce à une insurrection populaire de grande ampleur.
À l’automne 1944, quasiment tout le pays est libéré.
Référence
Simonnet Stéphane, Levasseur Claire, Balavoine Guillaume, 2004, Atlas de la libération de la France : 6 juin 1944-8 mai 1945 : des débarquements aux villes libérées, Paris, éd. Autrement, coll. Atlas-Mémoire.
UNION DES RÉPUBLIQUES SOCIALISTES SOVIÉTIQUES (URSS)
Durant le communisme de guerre (1918-1921), lorsque le nouveau pouvoir affronte les armées étrangères venues soutenir les Blancs, l’Armée rouge l’emporte, grâce, notamment, à la paysannerie, satisfaite de la redistribution des terres. La fédération, formée par 15 républiques soviétiques, est entérinée en 1922 : c’est l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS).
La NEP (Nouvelle Économie Politique) est une période de transition, de 1921 à 1929, pour redresser l’économie.
En 1929, nouveau virage, Staline lance un programme de collectivisation totale des terres et d’industrialisation rapide. Il s’ensuit une énorme famine (1932-1933). Les paysans révoltés sont nombreux à être déportés au Goulag (camps de travail forcé).
En 1938, les accords de Munich signés entre l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et l’Italie permettent à Hitler d’annexer les Sudètes. L’URSS et la Tchécoslovaquie n’ont pas été invitées. La France et le Royaume-Uni refusent toute alliance avec l’URSS. Celle-ci signe en 1939, avec l’Allemagne, le traité de non-agression germano-soviétique. Le 22 juin 1941, c’est l’opération Barbarossa : trois millions d’Allemands appuyés par l’aviation et la cavalerie envahissent l’URSS. Toute la population se mobilise pour défendre le pays. Staline libère du Goulag près d’un million de prisonniers qui sont incorporés dans l’armée. La contre-offensive soviétique débute en décembre 1941 à Moscou qui résiste, et résistera, à l’armée allemande. Par ailleurs, dans Léningrad assiégée, de septembre 1941 à janvier 1944, 800.000 habitants (un tiers de la population de la ville) meurent de faim, de froid et de maladie.
Stalingrad va devenir en février 1943 la ville emblématique de la résistance à l’invasion nazie et le symbole de la reconquête. Les combats acharnés entre soldats allemands et soviétiques se terminent par la reddition du général allemand Von Paulus et de ses troupes. C’est un tournant dans la guerre.
On estime que 26 millions de morts, civils et militaires, soit un sixième de la population active de l’URSS, ont disparu durant le conflit.
Au sortir de la guerre, le régime soviétique est auréolé du prestige de la victoire contre le nazisme.
Référence
Trotignon Yves, 1982, Le XXème siècle en URSS, Ed Bordas.
NAZISME
Le nazisme a pour but de créer une communauté nationale fondée sur la race épurée des Allemands (la race aryenne). Elle doit aussi être « améliorée » : par exemple, les opposants politiques et les individus qui manifestent des « comportements asociaux », tels les homosexuels, doivent être rééduqués dans des camps de concentration. Ceux qui sont biologiquement indésirables (handicapés, malades mentaux) doivent être expulsés de la communauté. Les “sous-hommes”, tels les Slaves, les Asiatiques, Arabes et Noirs peuvent être dominés. Les Tziganes, aryens supposés corrompus par des mélanges raciaux qui leur ont fait perdre leur aryanité, sont déportés et exterminés. On estime à 200.000 le nombre de Tziganes victimes de cette politique génocidaire.
Selon la doctrine nazie, les Juifs sont situés hors de la « sous-humanité » et constituent une menace permanente pour la pureté aryenne ; élément d’anéantissement de la communauté, la « souillure juive » doit être combattue, au regard d’Hitler et de ses adeptes, par tous les moyens jusqu’à la disparition de tous les Juifs.
Les mesures antijuives sont toujours présentées comme une réponse au « danger » venant des Juifs « agresseurs ». Pour détruire cette « race », les nazis mettent en œuvre la « solution finale de la question juive ».
Cette politique criminelle d’extermination des Juifs, systématique, programmée et à grande échelle, sur l’ensemble du continent européen, entraîne la mort de près de 6 millions d’êtres humains.
Au lendemain de la chute du régime nazi, ses principaux dirigeants sont jugés lors du procès de Nuremberg (novembre 1945-octobre 1946) et condamnés pour crimes de guerre et crimes contre l’Humanité.
Référence
Benbassa Esther (collectif), 2010, Dictionnaire des racismes, de l’exclusion et des discriminations. Larousse À présent.
AUSCHWITZ, CAMP DE CONCENTRATION ET D’EXTERMINATION
D’autres camps de travail forcé alentour vont contribuer également au développement de l’économie allemande.
En 1941, Himmler ordonne la construction d’un camp spécifique, destiné à l’extermination massive des Juifs d’Europe, sur le site du village voisin de Birkenau. Après divers essais sur les prisonniers de guerre, le gaz Zyklon B (un insecticide puissant) est utilisé par les nazis pour éliminer les déportés.
À partir de juillet 1942, les médecins nazis pratiquent la sélection à l’arrivée au camp : les déportés valides, rasés et tatoués d’un numéro matricule, sont envoyés au travail, les vieillards, les faibles, les femmes enceintes et les enfants à la mort.
Un chemin de fer aboutit au camp et en un jour, on peut décharger les victimes, en gazer 3 000 et en brûler près de 4 800.
R. Höss, commandant du camp, organise industriellement la mise à mort en trois temps : une zone de déshabillage (vêtements, chaussures, lunettes, prothèses dentaires sont récupérés, triés et destinés à la population allemande), une zone de gazage et une zone de fours crématoires.
Les médecins du camp effectuent des recherches « scientifiques » pour l’anéantissement biologique des populations non aryennes. Les nourrissons, les jumeaux, les nains, les femmes enceintes servent de « cobayes » aux manipulations génétiques du docteur Mengele.
Fin novembre 1944, face à l’avancée des armées alliées, Himmler donne l’ordre de détruire toutes les preuves du génocide et de démanteler les installations de mise à mort. Le 17 janvier 1945, le camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau est évacué. La « marche de la mort » entraîne sur les routes 58 000 déportés vers un camp de concentration éloigné. Ils avancent plusieurs jours dans le froid et la neige, sans nourriture. Beaucoup meurent en chemin, abattus par les nazis ou épuisés.
Au moins 1,3 million de personnes sont déportées à Auschwitz-Birkenau. Près d’un million de Juifs d’Europe y sont assassinés (dont 69 000 Juifs de France) ainsi que des Tziganes. Les Juifs représentent 90 % des victimes. Le camp d’Auschwitz-Birkenau n’est pas le seul centre de mise à mort mais il est devenu le symbole de la barbarie nazie. Il est libéré par l’Armée rouge le 27 janvier 1945.
Référence
Mémorial de la Shoah, 2011, Enseigner la Shoah. Étude de cas : le complexe d’Auschwitz-Birkenau.
MARCHES DE LA MORT
Mais les nazis ont besoin de main d’œuvre et des déportés encore valides peuvent être « réutilisés » à la fabrication d’armement.
” Nous marchons toute la nuit, de la neige jusqu’aux genoux. Interdiction de s’arrêter au risque d’être abattu sur place ; nous faisons nos besoins en marchant. Les SS, inquiets de l’avancée des troupes soviétiques, accélèrent le rythme. Nos forces s’affaiblissent rapidement ; de nombreux cadavres jonchent la route. Après une nuit et une journée de marche, nous faisons un arrêt dans une grange… Puis nous marchons encore deux jours et trois nuits, parcourant plus de 250 kms jusqu’à la gare de Gross-Rosen où nous attend un train. On monte dedans. Ce sont des wagons à plates-formes découvertes. Une fine couche de neige couvre le sol et se transforme en eau quand nous prenons place… Huit jours environ après avoir quitté Auschwitz, nous arrivons au camp de Ravensbrück. C’est une vision de l’enfer sur terre… Ce ne sont que vermine, morts et excréments…”
Ainsi, Paulette Sarcey, jeune militante de la section juive de la M.O.I., relate-t-elle sa marche de la mort à laquelle ont été contraintes plusieurs dizaines de milliers de déportées.
Références
— Sarcey Paulette (avec Karen Taïeb) 2015, Paula, Survivre obstinément. Ed. Tallandier
— Lettre des résistants et déportés juifs, janvier 1995, N° 21.
CAMPS D'EXTERMINATION
La politique génocidaire nazie, qui vise les Juifs (environ 6 millions de victimes) et les Tziganes, se déroule hors de ces camps.
Beaucoup de Juifs sont morts de faim dans les ghettos surpeuplés et miséreux de l’Est européen.
Près de la moitié d’entre eux sont assassinés lors des exécutions de masse (dite Shoah par balles), notamment en Ukraine, en Biélorussie et en Lituanie.
Des camions à gaz mobiles (par monoxyde de carbone, dioxyde de carbone, etc) renforcent le dispositif d’anéantissement.
La majorité des Juifs aboutit dans les centres de « mise à mort ».
Les chambres à gaz (au Zyklon B) et les fours crématoires, conçus en juillet 1942 pour se débarrasser des corps, y fonctionnent jour et nuit.
L’emplacement des camps d’extermination est choisi en raison de la proximité de voies ferroviaires et routières qui permettent d’acheminer les victimes. Les baraquements se réduisent à un ensemble très sommaire de structures. Les historiens s’accordent sur 6 principaux centres de mise à mort, tous situés en territoire polonais : Chelmno, Belzec, Sobibor, Treblinka, Majdanek et Auschwitz-Birkenau. C’est le seul complexe concentrationnaire qui, sur un même lieu, est à la fois centre de mise à mort et camp de concentration.
Références
— Bruttmann Tal, Tarricone Christophe, 2020, Les Cent Mots de la Shoah, Que sais-je ? Éditions PUF.
— Hilberg Raul 1988, La Destruction des Juifs d’Europe, Ed. Fayard.
GÉNOCIDE
Le génocide est l’anéantissement délibéré et méthodique d’un groupe d’humains en raison de leur race, de leur appartenance ethnique, de leur nationalité ou de leur religion, dans le but de les faire disparaître totalement, au nom d’un principe raciste ou d’une idéologie.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, en janvier 1942, des dignitaires nazis, lors de la conférence de Wannsee, planifient la « solution finale de la question juive », à savoir la déportation et la mise à mort des Juifs dans tous les pays occupés par l’Allemagne hitlérienne.
La Solution finale est la dernière étape du génocide des Juifs d’Europe. Elle est dans la ligne de la politique d’extermination des Juifs menée par le IIIème Reich.
Les premières victimes en sont les Juifs polonais après l’invasion de leur pays par l’armée allemande, en septembre 1939 ; ils sont massacrés ou enfermés dans des ghettos où ils seront condamnés à mourir malgré une résistance acharnée.
En juin 1941, la Wehrmacht (armée du IIIème Reich) envahit l’URSS, notamment la Lituanie, l’Ukraine, la Biélorussie et fait assassiner les Juifs par des unités mobiles d’extermination lors de massacres de masse dits Shoah par balles.
En Europe de l’ouest, l’extermination des Juifs s’accélère et prend une dimension industrielle avec le recours massif au gaz. Ce génocide est appelé holocauste ou Shoah et est responsable de l’extermination de 6 millions de personnes. Il se singularise par trois points :
— Il s’exerce non pas sur un pays mais sur plusieurs dizaines de pays, un continent entier, l’Europe, et avec le projet de déborder sur l’Afrique du Nord.
— il vise des populations sans pays et donc sans terre à conquérir.
— Il se réalise selon un projet méthodique, systématique, planifié et industrialisé.
Des Juifs, originaires de toute l’Europe occupée, sont déportés jusqu’aux centres de mise à mort (ou camps d’extermination).
Les Tziganes sont également victimes de cette politique exterminatrice.
En 1958, l’ONU adopte la définition juridique du génocide.
En France, le génocide est puni en tant que crime contre l’Humanité. Il est imprescriptible.
Référence
Bruneteau Bernard, 2016, Un siècle de Génocides, Ed. Armand Colin