ANTISÉMITISME
À l’époque contemporaine, l’antisémitisme revêt deux nouvelles formes. Avec le développement du capitalisme industriel et financier, les Juifs sont désormais dénoncés comme protagonistes de l’exploitation, bénéficiaires de la « dictature du profit », et visant à la domination du monde. Le fantasme affecte presque tous les courants politiques. À gauche, en évoquant les Rothschild, on dénonce le capitalisme. À droite, on fustige les Juifs artisans des révolutions. C’est aussi, au milieu du 19ème siècle et dans la première moitié du 20ème, l’émergence d’un antisémitisme « biologique » énonçant le « caractère dégénéré » de la « race juive ». Les deux formes se combinent pour culminer dans le nazisme, contempteur du « judéo-capitalisme », du « judéo-bolchévisme » et à l’origine de la Shoah.
En France, le krach de l’Union générale (1882) inaugure une longue période de récession économique. Cette banque s’affirme, face aux anciennes banques juives et protestantes, comme la banque des catholiques. Sa faillite ruine des milliers de petits épargnants qui, ignorant les pratiques financières douteuses d’Émile Bontoux son créateur, en rendront responsable la banque juive (Rothschild). C’est le début d’une vague antisémite. L’ouvrage de Drumont, La France juive (1886) et l’Affaire Dreyfus (1894-1906) constituent des moments forts de la diffusion des rumeurs complotistes (le « complot » des Juifs pour la domination mondiale). Le Protocole des Sages de Sion (1901), faux antisémite fabriqué par l’Okhrana (police secrète tsariste), trouve au 20ème siècle une large audience et continue, de nos jours, à alimenter les théories du complot.
Référence
Poliakov Léon, 1955, Histoire de l’antisémitisme, Éditions du Seuil, coll. Points Histoire.