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août 42 - mai 43

Ruines du Ghetto

RUINES DU GHETTO

Marceau Vilner, militant juif communiste M.O.I., fondateur de la Presse nouvelle hebdomadaire (PNH) témoigne :

 

« Au mois de septembre 1943, furent conduits d’Auschwitz à Varsovie deux mille déportés juifs français, belges, hollandais et grecs. J’étais du convoi. Quand nous descendîmes du train, dans une gare à la limite du ghetto, à l’aube, une image effroyable s’offrit à nos yeux. De toutes les maisons, étrangement déchiquetées, ne restaient debout que les murs extérieurs. Lits, briques et ferrailles se trouvaient projetés sur la chaussée Chaque maison, vidée, consumée par le feu, offrait un aspect différent […] Quelques débris fumaient encore.

Nous fûmes parqués dans un camp de concentration, au cœur du ghetto. Notre travail consistait à démolir une par une ces ruines, à nettoyer les briques et à récupérer la ferraille. Ces dizaines de millions de briques et ces centaines de milliers de poutres devaient être acheminées vers l’Allemagne comme butin de guerre.

Au premier contact de ces ruines, nous sûmes que, dans les constructions souterraines savamment dissimulées, il y avait encore des survivants. Une brigade spéciale de S.D. était chargée de découvrir les abris et de fusiller les survivants, afin de ne laisser aucune trace, aucun témoin.

Le troisième jour, un camarade avait fait une découverte à l’insu des gardiens S.S. […] Je m’arrangeai pour travailler à la ruine signalée […]. 

En avançant, je me heurtai à une femme brandissant un revolver. Deux hommes étaient étendus à ses côtés, immobiles, agonisants.

Une semaine après, le quartier sautait à la dynamite, enterrant vifs tous ceux qui s’y trouvaient encore.

Plusieurs mois plus tard, avec un ami, je descendis un jour dans les égouts. Tout au long se trouvait une rangée de cadavres asphyxiés, chacun tenant à la main une valise ou un sac. Le tout en décomposition avancée. On pouvait sans peine reconstituer les événements. Quand le ghetto brûla et que les combats approchèrent de leur fin, un certain nombre essaya de gagner le côté « aryen » par la voie souterraine. Les Allemands, l’ayant appris,  obstruèrent les bouches des égouts et attaquèrent les fugitifs aux gaz.

Un autre jour, un camarade trouva un journal tenu au jour le jour par une jeune fille, pendant trois mois : avril, mai, juin 1943. Ce journal s’arrêtait au milieu d’une phrase, un jour de juin… »[…].

 

Extrait de la plaquette « Le chant du ghetto de Varsovie », supplément au n° 138 de la Presse Nouvelle hebdomadaire (PNH).

Texte repris dans le n° 275 d’Avril 2010 de la Presse Nouvelle magazine (PNM) 

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