JUIFS IMMIGRÉS ET FRONT POPULAIRE
La victoire du Front populaire galvanise les Juifs progressistes et ils défilent en masse au cimetière du Père Lachaise, en souvenir des communards assassinés, sous une banderole inédite « Contre tous les nationalismes, pour l’union des travailleurs immigrés et français ».
La formule est reprise dans tous les journaux.
La Naïe Presse, journal progressiste juif en yiddish, émanation de la section juive de la M.O.I., gagne encore de nouveaux lecteurs.
Des grèves éclatent un peu partout en France.
Les 22 sections juives qui comptent 13000 syndiqués s’investissent dans le mouvement social.
Les ouvriers juifs sont partie prenante des deux millions de grévistes, ils occupent les usines aux côtés de leurs camarades. Dans tous les secteurs d’activité, les progrès sont considérables : salaires, horaires, conventions collectives et, bien sûr, congés payés.
Pour les travailleurs juifs, le rapprochement avec les ouvriers français est une victoire à la fois morale, sociale et politique.
Mais les immigrés non naturalisés se sentent en insécurité et en novembre 1936, La Naïe Presse appelle à l’union des juifs immigrés avec les Juifs « autochtones » dans la lutte contre le fanatisme et le sectarisme.
Une commission de juristes juifs propose un « statut juridique de l’immigré » pour protéger les travailleurs car la situation générale du pays est inquiétante.
Une pause dans les réformes sociales est officiellement déclarée.
Le « Mouvement populaire juif » (qui regroupe plusieurs tendances), créé en 1935 à l’initiative de la section juive de la M.O.I. et de la Ligue Internationale Contre l’Antisémitisme (LICA), s’inscrit toujours vigoureusement dans la lutte antifasciste.
Le marasme économique va conduire à la démission du chef du gouvernement, Léon Blum (qui n’obtient pas les pleins pouvoirs pour sa réforme), et à la fin du Front populaire en avril 1938. L’espoir démocratique est anéanti avec le triomphe des nationalistes franquistes en Espagne.
La victoire du fascisme annonce le pire pour l’Europe, pour la France…
Références
— Cukier Simon, Decèze Dominique, Diamant David, Grojnowski Michel, 1987, Juifs révolutionnaires, Messidor/Éditions sociales.
— Diamant David, 1979, Combattants juifs dans l’armée républicaine espagnole 1936-1939, Éditions du Renouveau.