Le 29 mai 1942, une ordonnance instaure le port de l’étoile juive en public, pour les Juifs de plus de six ans, français ou étrangers, en zone occupée. Dès le 7 juin 1942, cette étoile, de couleur jaune, doit être cousue sur le vêtement extérieur et sur le côté gauche de la poitrine.
Les résistants juifs communistes tentent de faire comprendre à la population juive l’acuité du danger au fur et à mesure qu’eux-mêmes sont informés. Un numéro de juin du journal clandestin Unzer Wort, appelle les Juifs à se rapprocher de la population française.
Au début du mois de juillet 1942, grâce aux « fuites » de policiers résistants, « Solidarité » , organisation clandestine de la section juive de la M.O.I., alerte les Juifs en diffusant un tract en yiddish qui annonce des déportations massives. Le texte incite les Juifs, jusque-là très légalistes, à se cacher. Mais tous ne pourront échapper à leurs poursuivants. C’est, une fois de plus, la police française qui opère, à la demande des nazis.
La plus grande rafle de Juifs étrangers, apatrides ou dénaturalisés est programmée le jeudi 16 et le vendredi 17 juillet 1942.
13152 Juifs sont appréhendés. Les couples sans enfants et les célibataires sont internés directement à Drancy. Les familles sont parquées à Paris dans le vélodrome d’hiver. Après plusieurs jours de détention dans des conditions barbares, elles transitent dans les camps d’internement de Pithiviers et Beaune-la-Rolande.
Les adultes et les adolescents partent les premiers pour l’anéantissement programmé. Les enfants en bas âge sont arrachés à leurs mères, transférés à Drancy puis déportés à leur tour. Tous, femmes, hommes, vieux, jeunes, vont être entassés dans des wagons à bestiaux en direction de la Pologne. L’objectif : le camp de la mort d’Auschwitz.
Cette rafle, dite rafle du Vel’d’Hiv, s’attaque pour la première fois aux femmes, aux vieillards et aux enfants. Plus de 4000 enfants.
Ils seront les premiers gazés. Aucun ne sera épargné. À la rentrée scolaire, en octobre 1942 à Paris, dans de nombreux quartiers, il manquera beaucoup d’enfants dans les classes… Au total, plus de 6000 enfants juifs seront exterminés au cours de l’année 1942.
Aux mêmes dates, des Juifs, adultes et enfants, sont arrêtés dans toutes les régions de France, regroupés dans les camps d’internement puis déportés à Auschwitz.
Après les 16 et 17 juillet, une centaine de jeunes Juives et Juifs parisiens qui ont échappé à la rafle, viennent spontanément gonfler les effectifs des FTP-M.O.I. La section juive de la M.O.I. est en première ligne du combat politique et de la Résistance armée.
Le port de l’étoile jaune et la rafle du Vel’ d’Hiv constituent un véritable tournant dans la prise de conscience, au sein de la population juive et non-juive, de la barbarie nazie et vichyste.
ÉTOILE JUIVE
Pendant la Seconde Guerre mondiale, cette étoile, en tissu, doit être cousue sur le côté gauche du manteau. Elle se situe dans la lignée des signes discriminatoires subis par les Juifs au cours de leur longue Histoire. L’étoile jaune rappelle, notamment, la rouelle du Moyen Âge.
Les nazis imposent le port de l’étoile jaune à tous les Juifs d’Europe. La mesure est généralisée le 1er septembre 1941 par une décision du dirigeant nazi Heydrich alors que l’extermination systématique des Juifs d’Europe orientale a déjà commencé avec les massacres de masse en Ukraine, en Lituanie…
Le centre de l’étoile porte le mot « Juif » en langue locale (« Jude » en Allemagne, « Juif » en France, etc). La calligraphie est censée rappeler l’écriture hébraïque.
En France, le port de cette étoile, prescrit par l’ordonnance allemande du 29 mai 1942, est rendu obligatoire en zone nord occupée, à compter du 7 juin. Tous les Juifs âgés de plus de six ans doivent la porter en public de manière visible.
Les autorités, françaises et allemandes, chargent la police française de veiller à l’application de l’ordonnance. L’étoile jaune intensifie la ségrégation dans la vie quotidienne, illustrée dès 1940 par le premier statut des Juifs, puis en 1941 par le second statut. Autre objet lié à la discrimination, la carte d’identité portant la mention « juif » double le marquage, au nord puis au sud. Le port obligatoire de l’ étoile marque le début de l’affichage de la politique de persécution, conduite par les nazis et leurs collaborateurs, mais c’est aussi le départ d’une prise de conscience, dans la population, du sort réservé aux Juifs.
La soixantaine de citoyens français non juifs qui portent l’étoile jaune par solidarité sont emprisonnés en tant qu’ « amis des Juifs ».
Les résistants de la section juive de la M.O.I., appelle la population juive, jusque-là majoritairement légaliste, à la désobéissance, notamment quant au port de l’étoile juive.
Référence
Klarsfeld Serge, 1992, L’Étoile des Juifs : témoignages et documents, Paris, Ed. L’Archipel
UNZER WORT
Unzer Wort reparaît, à intervalles assez réguliers, à partir du 29 septembre 1940.
Par la suite, la version française, en zone nord, a pour titre Notre Parole, la parole de l’opposition des Juifs progressistes au fascisme et à l’antisémitisme.
Principal organe de la Résistance juive sous l’Occupation, le journal dénonce (en yiddish et en français) les internements massifs de Juifs étrangers, les mesures discriminatoires prises contre les Juifs et lance des appels à la Résistance.
Fin mars 1941, les premières arrestations de Juifs communistes ont lieu à Paris. Huit militants sont appréhendés, dont Isidore Fuhrer, chez qui on découvre une machine à écrire à caractères hébraïques (utilisés en yiddish) et un stencil destiné à Unzer Wort.
Dès le 8 août 1941, un numéro de Unzer Wort exhorte « les masses populaires juives » à aller « comme toujours, main dans la main avec le peuple français dans la lutte contre le fascisme, pour une France libre » où les Juifs, seront des « citoyens libres. »
Le 24 août 1941, des intellectuels et des artistes juifs d’URSS révèlent sur les ondes de Radio Moscou les massacres de masse perpétrés contre les Juifs à l’Est et appellent les Juifs du monde entier à intensifier leur combat contre le nazisme. L’appel est publié le 1er septembre 1941 en France grâce à un numéro spécial d’Unzer Wort imprimé chez Rudolf Zeiler.
En juin 1942, à Lyon, paraissent l’édition de la zone Sud de Unzer Wort et sa version française, Notre Voix.
90 numéros de Unzer Wort sont publiés à la fois en yiddish et en français, entre 1940 et 1944.
Des militants juifs sont exécutés pour avoir propagé des idées communistes et antinazies. Les animateurs de la presse clandestine juive sont particulièrement visés : une trentaine d’entre eux sont fusillés ou déportés.
Référence
Cukier Simon, Decèze Dominique, Diamant David, Grojnowski Michel, 1987, Juifs révolutionnaires. Messidor/Éditions sociales
"SOLIDARITÉ"
L’action sociale n’y est jamais séparée de l’action politique et la mission de « Solidarité » est quadruple :
1. Aider matériellement les familles des combattants juifs, morts, prisonniers ou internés dans les camps du régime de Vichy.
2. Empêcher l’isolement de la population juive.
3. Préciser la position politique du Parti communiste en général et à l’égard des Juifs en particulier.
Selon le PCF, l’éradication de l’antisémitisme suppose l’instauration du communisme. Dans la conjoncture présente, le Parti estime que la « question juive » est du ressort de la section juive de la M.O.I. et de « Solidarité ».
4. Diffuser l’information sur l’ensemble de la situation.
L’importance de la presse n’a jamais échappé aux communistes. Les anciens rédacteurs de La Naïe Presse (dont L. Gronowski, ex-rédacteur en chef) se remobilisent.
Le journal reparaît clandestinement en septembre 1940, sous un titre yiddish, déjà utilisé brièvement en octobre 1939, Unzer Wort. Par la suite, la version française aura pour titre Notre Voix ou encore Notre Parole, la parole de l’opposition des Juifs communistes au pétainisme et à l’antisémitisme.
En novembre 1940, cinquante groupes de « Solidarité » fonctionnent à Paris.
Très rapidement, proches de « Solidarité », se créent des sections d’intellectuels juifs, d’artistes, de médecins, de juristes.
Des organisations comme l’Union des femmes juives, l’UFJ, qui, au début 1941 ou l’Union des Jeunesses Communistes juives, l’ UJCJ, vont jouer, auprès de « Solidarité » un rôle spécifique dans la lutte contre Vichy et, plus tard, contre l’occupant.
Ces organisations s’engagent précocement dans la Résistance. Dès l’été 1941, elles fournissent des combattants à la lutte armée qui débute et la soutiennent politiquement et matériellement.
Référence
Cukier Simon, Decèze Dominique, Diamant David, Grojnowski Michel, 1987, Juifs révolutionnaires, Messidor/Éditions Sociales.
YIDDISH
Dans leur errance, les Juifs ont suivi la route des légions romaines et traversé la France pour se fixer dans les régions rhénanes.
Ils parlent, alors, des dialectes romans et leur langage se mêle peu à peu aux dialectes germaniques du Moyen Âge.
Aux éléments germaniques de base, ils incorporent des éléments romans et y ajoutent des termes hébreux et araméens.
Peu à peu, à partir du 14ème siècle, naît une véritable langue, autonome, avec des sons nouveaux, apparentée par sa grammaire à l’allemand mais évoluant selon ses lois propres.
Une création littéraire importante en témoigne dès le Moyen Âge.
Après 1348-1349, à la suite de massacres qui les déciment en partie (on les rend responsables de la Grande Peste !) un exode massif conduit les Juifs vers Prague et la Pologne.
Ce transfert de populations juives du centre vers l’est européen place le yiddish hors de l’orbite germanique.
Cette langue s’épanouit dans les pays slaves et devient totalement originale et indépendante.
La prononciation se transforme au contact des apports polonais, ukrainiens ou tchèques mais le changement fondamental concerne la syntaxe. Les modes slaves, germaniques et hébraïques se croisent. Le yiddish se libère des formes compliquées.
Au milieu du 18ème siècle, les hébraïsants, hostiles au « jargon », se rallient peu à peu au yiddish. Au 19ème siècle, les écrivains de langue yiddish fondent une langue moderne et annoncent la littérature yiddish classique.
À Wilno (l’actuelle Vilnius), le YIVO, Centre culturel et scientifique juif, fixe la langue.
Jusqu’en 1939, une littérature yiddish, foisonnante et diverse, témoigne de l’extraordinaire vigueur de cette langue, à la fois outil de lutte et moyen de communication.
Références
— Cerf Cécile, (1959), La langue yidich, Cop. by Europe et les Editeurs Français Réunis, revue EUROPE, septembre 1959, pages 18 à 27.
— Cerf Cécile, (1974), Regards sur la littérature yidich, Académie d’Histoire, Paris
N. B : L’orthographe anglo-saxonne, « yiddish » prévaut désormais.
POLICE FRANÇAISE DE VICHY
Une grande réforme de la police est actée par la loi du 23 avril 1941 : création des GMR (groupes mobiles de sécurité), d’une École nationale pour la formation des cadres et d’écoles régionales de police. Le gouvernement de Vichy attribue à cette nouvelle police des moyens très importants.
En octobre 1941, le Préfet de police transmet lui-même aux nazis une liste de noms d’otages à fusiller.
Fin 1941, avec la création de polices parallèles (Brigades spéciales anticommunistes et antijuives, service des sociétés secrètes dont les francs-maçons…) la répression s’intensifie.
La police française se charge elle-même du rassemblement des Juifs (enfants inclus) dans les camps de transit avant déportation. Les rafles de Juifs étrangers, les 16 et 17 juillet 1942 à Paris (dites « Rafle du Vel’d’Hiv ») et celle du 26 août en zone « libre » sont entièrement planifiées par la haute administration et la police française sous les ordres de René Bousquet. La majorité de ces Juifs sera exterminée dans le camp de la mort d’Auschwitz.
En janvier 1943, la police française seconde les nazis lors de la grande rafle de Marseille. Les mois suivants, les brigades spéciales de la préfecture de police de Paris traquent les Juifs résistants de la M.O.I. et les déciment.
Dans leur majorité, les policiers français obéissent aux ordres mais il convient, cependant, de noter que 54 policiers et gendarmes sont déclarés, en France, « Justes parmi les nations » en 2009, et 68 en 2017. Quelques-uns, par exemple, préviennent la section juive de la M.O.I. de l’imminence de la rafle du Vel’d’Hiv qui aurait pu être plus meurtrière encore. Autre exemple : grâce à 7 policiers du service des étrangers à Nancy, plus de 350 Juifs se mettent à l’abri la veille de la rafle du 19 juillet 1942.
Jusqu’en 1944, la participation des policiers à la Résistance reste minoritaire. 200 policiers s’emparent, le 19 août 1944, de la Préfecture de police et participent à l’insurrection qui aboutit à la Libération de Paris.
Références
— Joly, Laurent, 2018. L’État contre les juifs : Éditions Grasset.
— Berlière, Jean-Marc, 2018, Polices des temps noirs – France 1939-1945. Éditions Perrin
— Comité français pour Yad Vashem
CAMPS DU LOIRET. CAMPS DE TRANSIT
Dans les camps du Loiret, le comportement de la direction fait osciller le régime de l’internement entre des périodes de laisser-aller et des actions répressives, avant, finalement, de se durcir. Les internés peuvent, au début de leur enfermement, rester en rapport avec leurs familles (courrier, visites, permissions), mais ces occasions sont soumises à des variations et s’interrompent. Au cours de l’été 1941, les évasions (800 environ) sont encore nombreuses mais elles deviennent vite difficiles et finalement impossibles. Certains groupes organisent une vie culturelle, d’autres se structurent en un comité clandestin de Résistance et établissent le contact avec des mouvements extérieurs au camp. Les communistes organisent des activités autorisées ou clandestines.
Au printemps 1942, les camps de transit sont pleins. Les internés sont rapidement déportés vers des camps de concentration et d’extermination pour laisser la place à de nouvelles victimes.
Les 13152 raflés du Vel’ d’Hiv aboutissent à Pithiviers, Beaune-la-Rolande et Drancy devenu le camp de transit le plus important, symbole de la persécution, plaque-tournante de la déportation des Juifs, y compris des enfants, vers les camps de la mort.
Référence
Peschanski Denis, 2000, Les camps français d’internement (1938-1946), Ed. Université Panthéon-Sorbonne.
AUSCHWITZ, CAMP DE CONCENTRATION ET D’EXTERMINATION
D’autres camps de travail forcé alentour vont contribuer également au développement de l’économie allemande.
En 1941, Himmler ordonne la construction d’un camp spécifique, destiné à l’extermination massive des Juifs d’Europe, sur le site du village voisin de Birkenau. Après divers essais sur les prisonniers de guerre, le gaz Zyklon B (un insecticide puissant) est utilisé par les nazis pour éliminer les déportés.
À partir de juillet 1942, les médecins nazis pratiquent la sélection à l’arrivée au camp : les déportés valides, rasés et tatoués d’un numéro matricule, sont envoyés au travail, les vieillards, les faibles, les femmes enceintes et les enfants à la mort.
Un chemin de fer aboutit au camp et en un jour, on peut décharger les victimes, en gazer 3 000 et en brûler près de 4 800.
R. Höss, commandant du camp, organise industriellement la mise à mort en trois temps : une zone de déshabillage (vêtements, chaussures, lunettes, prothèses dentaires sont récupérés, triés et destinés à la population allemande), une zone de gazage et une zone de fours crématoires.
Les médecins du camp effectuent des recherches « scientifiques » pour l’anéantissement biologique des populations non aryennes. Les nourrissons, les jumeaux, les nains, les femmes enceintes servent de « cobayes » aux manipulations génétiques du docteur Mengele.
Fin novembre 1944, face à l’avancée des armées alliées, Himmler donne l’ordre de détruire toutes les preuves du génocide et de démanteler les installations de mise à mort. Le 17 janvier 1945, le camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau est évacué. La « marche de la mort » entraîne sur les routes 58 000 déportés vers un camp de concentration éloigné. Ils avancent plusieurs jours dans le froid et la neige, sans nourriture. Beaucoup meurent en chemin, abattus par les nazis ou épuisés.
Au moins 1,3 million de personnes sont déportées à Auschwitz-Birkenau. Près d’un million de Juifs d’Europe y sont assassinés (dont 69 000 Juifs de France) ainsi que des Tziganes. Les Juifs représentent 90 % des victimes. Le camp d’Auschwitz-Birkenau n’est pas le seul centre de mise à mort mais il est devenu le symbole de la barbarie nazie. Il est libéré par l’Armée rouge le 27 janvier 1945.
Référence
Mémorial de la Shoah, 2011, Enseigner la Shoah. Étude de cas : le complexe d’Auschwitz-Birkenau.
Rafle du Vel’d’Hiv
Grâce à quelques policiers résistants qui divulguent l’information, un tract de « Solidarité », émanation de la section juive de la M.O.I., annonce aux Juifs, en yiddish et en français, l’imminence d’une grande rafle.
Les 16 et 17 juillet 1942, sur injonction des nazis, 7000 policiers et gendarmes opèrent une arrestation massive de Juifs, organisée par René Bousquet, secrétaire général de la police de Vichy, et le Commissaire Général aux Questions juives, Louis Darquier de Pellepoix. Les Juifs, étrangers et apatrides et les Juifs dénaturalisés sont appréhendés. Provisoirement, les Juifs français ne sont pas concernés.
Nombre de Juifs n’ont su où se cacher mais sans le tract diffusé par « Solidarité », le bilan eût été plus lourd encore. 13152 Juifs sont raflés à Paris. Parmi eux et pour la première fois, des femmes, des vieillards et des enfants. Plus de 4000 enfants. Les célibataires et les couples sans enfants sont envoyés directement au camp de Drancy. Les familles sont entassées au Vélodrome d’Hiver ; les conditions de détention sont atroces, l’odeur pestilentielle. Après plusieurs jours d’enfermement au Vel’d’Hiv, les familles sont regroupées dans les camps de transit de Beaune-la-Rolande et Pithiviers. L’escalade dans l’inhumanité s’accélère : les adultes et les adolescents partent les premiers pour l’extermination programmée. Les enfants en bas âge sont arrachés à leur mère, transférés à Drancy puis déportés à leur tour.
Tous vont être entassés dans des wagons à bestiaux en direction du camp d’Auschwitz, en Pologne. Les enfants seront les premiers gazés.
Les dernières recherches mettent en avant une « rafle après la rafle ». Le nombre de Juifs raflés étant considéré comme insuffisant, l’opération se poursuit fin août. 1200 adultes et des centaines d’enfants sont appréhendés. Le bilan atteint alors 14000 victimes. D’autres rafles suivront.
Seuls les Juifs non-français sont visés par ces rafles mais le régime de Vichy, pour asseoir son pouvoir face aux nazis, envoie en déportation 3000 enfants français de parents étrangers. L’objectif est d’alourdir le bilan de la rafle du Vel’ d’Hiv.
À la rentrée scolaire, en octobre 1942 à Paris, il manquera beaucoup d’enfants dans les classes… Dans les régions, à Bordeaux par exemple, sur ordre de Maurice Papon, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, ce 16 juillet 1942, le sort des Juifs, adultes et enfants, est le même : Drancy, Auschwitz…
Il faudra attendre le 16 juillet 1995 pour que les crimes du régime de Vichy soient officiellement reconnus. Le président de la République française, Jacques Chirac, dira : « Oui, la folie criminelle de l’occupant a été secondée par des Français, par l’État français ».
Références
— Klarsfeld Serge, 1983, Vichy-Auschwitz : le rôle de Vichy dans la solution finale, Paris, Ed. Fayard.
— Paxton Robert O., 1999, La France de Vichy : 1940-1944. Paris Ed. du Seuil.
— Joly Laurent, 2022, La rafle du Vel’d’Hiv. Paris, juillet 1942. Ed. Grasset
CHAMBRES À GAZ
Après l’invasion de l’URSS par l’Allemagne en juin 1941, les Einsatzgruppen (unités mobiles d’extermination) exécutent, avec armes à feu, des massacres de masse de Juifs (en Ukraine, Biélorussie et dans les pays baltes).
Pour une destruction plus expéditive, les nazis testent l’utilisation de camions à gaz itinérants hermétiquement fermés. Leur échappement est dirigé vers le compartiment intérieur. Des centaines de milliers de personnes, Juifs, Tsiganes, malades mentaux, opposants, sont assassinées.
Fin 1941, les nazis accélèrent le processus de destruction : le camp de Chelmno devient le centre expérimental de gazage par camions.
En 1942, l’extermination systématique dans des chambres à gaz fixes (avec du monoxyde de carbone généré par des moteurs diesel) commence dans les camps de Belzec, Sobibor, Treblinka, Majdanek, situés en Pologne. À leur arrivée, les victimes sont jetées hors des wagons à bestiaux et censées être désinfectées par des “douches”. Plus grande est l’accumulation des corps nus dans les chambres à gaz, plus rapide est la suffocation des victimes.
Les nazis cherchent constamment des procédés d’extermination plus efficaces. Au camp d’Auschwitz, situé également en Pologne, ils expérimentent le Zyklon B (un puissant pesticide) en gazant, en septembre 1941, quelque 600 prisonniers de guerre soviétiques et 250 prisonniers malades. Les pastilles de Zyklon B se transforment en gaz toxique au contact de l’air. Ce gaz se révèle être le produit de gazage le plus rapide et il est choisi pour l’extermination de masse des Juifs à Auschwitz. On y asphyxie jusqu’à 12000 victimes par jour.
Bien que n’ayant pas été spécifiquement prévus pour servir de lieux de mise à mort, les camps de concentration de Natzweiler-Struthof, Mauthausen, Sachsenhausen et Ravensbrück sont également dotés de chambres à gaz. Relativement petites, elles sont conçues pour les prisonniers considérés comme inaptes au travail. La plupart de ces camps utilisent aussi le Zyklon B.
Les massacres de masse par balles, dans les territoires soviétiques occupés par les nazis constituent la première phase de la « solution finale de la question juive ». Sur 6 millions de Juifs victimes du génocide, les chambres à gaz représentent environ 2,7 millions de morts.
Références
— Berenbaum Michael, 1993, The world must know, Ed. United States Hocolaust Memorial Museum.
— Bruttmann Tal, Tarricone Christophe, 2020, Les cent mots de la Shoah, Que sais-je ? Éditions des PUF.